Salon de l’agriculture : la solidarité, c’est aussi sur Internet

Laurent Bernède (au centre) a réuni les ambassadeurs de We Farm up au Village by CA de Toulouse jeudi dernier afin de démultiplier la diffusion de la plate-forme de partage de machines agricoles en France.

wefarmup

Le Salon international de l’agriculture se tient du 24 février au 4 mars, porte de Versailles, à Paris, autour du thème "l’agriculture, une aventure collective". Exemple à Francescas (47), où Laurent Bernède a créé "wefarmup", une plateforme grâce à laquelle on peut louer la machine et celui qui la conduit. Le site: https://www.wefarmup.com/fr/

"La révolution numérique bouscule les modes d’organisation, de mutualisation et de coopération qui existent depuis longtemps dans le monde agricole. Elle a permis d’élargir le champ des opportunités avec une certaine immédiateté. Moi agriculteur, je peux trouver un type qui me ressemble et coopérer avec lui…
La plateforme collaborative qui permet aux agriculteurs de louer le matériel qu'ils n'utilisent pas veut s'étendre à la Belgique dès 2018. «We farm up» a aussi lancé un club des ambassadeurs.

C'est le Airbnb du matériel agricole. Voilà la façon la plus simple de décrire la start-up We farm up lancée par Laurent Bernède et Jean-Paul Hebrard en octobre 2015. Voilà deux que tous deux évangélisent les campagnes de France pour expliquer qu'il est inutile de laisser dormir des millions d'euros d'actifs de machines agricoles sous les hangars des fermes. L'idée est de proposer aux paysans la plateforme We farm up pour les mettre à la location et ainsi générer des revenus complémentaires. «Demain les agriculteurs auront de réelles difficultés à accéder à la machine agricole qui devient un produit de luxe» prévient Laurent Bernède, lui-même agriculteur dans le Lot-et-Garonne. Pour un tracteur neuf de 150 CV, il faut en effet désormais compter 80 000 €. Sur certaines références, les machines agricoles ont vu leur prix doubler en vingt ans. Pour l'acquérir, l'agriculteur s'endette à taux fixe alors que ses revenus sont tributaires des variations des cours mondiaux. «Quand les cours s'effondrent, la trésorerie fond et le remboursement des traites de matériels devient insurmontable» explique le président de la société installée à Seysses au Sud de Toulouse.

6 000 agriculteurs en deux ans

D'où l'idée de «louer plutôt que d'acheter» martèle cet ancien concessionnaire John Deere. Chiffres à l'appui, le start-uper de 41 ans vient de démontrer que trop de capital immobilisé dort sous les hangars des agriculteurs plombant l'équilibre économique des exploitations. En partenariat avec la coopérative Agrod'Oc, We farm up a réalisé une cartographie précise des matériels agricoles avec leur temps d'utilisation et leurs coûts (remboursement, assurance, réparation…). L'étude conclut qu'en louant plutôt qu'en achetant, il est possible de réduire les capitaux investis de 51 % sur les semoirs, de 49 % sur les tracteurs et même 45 % sur les moissonneuses «car il est faux de penser que les paysans utilisent tous le même matériel en même temps» assure Laurent Bernède. En deux ans, la plateforme a attiré 6 000 agriculteurs qui ont déposé plus de 5 000 machines agricoles à la location. Certains mettent en ligne tout leur parc, d'autres seulement une ou deux machines. Le panier moyen d'un acte de location atteint 1 500 € sur lesquels la plateforme prélève une commission de 15 %. «Quand on sait que selon la MSA 50 % des agriculteurs touchent moins de 350 € par mois, quand We Farm up leur fait un virement de 2000 ou 3 000 € c'est très appréciable» glisse Laurent Bernède.

Nouveau tour de table

Afin de porter cette bonne parole partout en France, la start-up a lancé en mars dernier un club des ambassadeurs. «Qui mieux qu'un agriculteur peut expliquer notre plateforme à un autre agriculteur» résume Laurent Bernède. Les 70 porte-parole ont pour mission de recruter de nouveaux candidats pour rejoindre We Farm up en échange d'une rémunération. Ainsi pour deux à huit jours par mois consacrés à la plateforme, la rémunération peut atteindre 500 à 1 500 €.

Après une première levée de fonds de 600 000 €, un second tour de table est programmé pour 2018 afin de se lancer à l'international. La première cible sera la Belgique début 2018 avec le soutien de la Fédération wallonne de l'agriculture. D'autres pays européens suivront avant de s'attaquer aux pays en développement car la croissance est à l'export. Le marché mondial de la location de machines agricoles est estimé à 20 milliards de dollars. We farm up emploie dix salariés et réalisera près de 300 000 € de chiffre d'affaires en 2017.

Louer avec ou sans chauffeur

Depuis jeudi dernier, We Farm up a lancé une nouveauté : la possibilité de louer un matériel avec un chauffeur. Une option rendue nécessaire par la complexité de certains matériels. L'option peut aussi permettre à l'agriculteur de se familiariser avec de nouvelles machines grâce à l'appui d'un de ses collègues. C'est lors de la mise en ligne de la machine que le paysan choisit ou non de rendre accessible cette possibilité moyennant finance supplémentaire. Le chauffeur peut aussi être un moyen de sous-traiter une tâche en cas de surcharge d'activité à la ferme. (Gil Bousquet) 17/2/2018